Vaste pays sans littoral de 623 000 km², au cœur du continent africain et faiblement peuplé avec 5,189 millions d’habitants en 2018, la République Centrafricaine (RCA) dispose d’énormes potentialités en ressources naturelles mais demeure paradoxalement très pauvre. Elle est ruinée par plusieurs décennies de conflits militaro-politiques récurrents, entrainant de forts mouvements de populations ces cinq dernières années. Les difficultés de création d’emploi pour les jeunes et les femmes et la prolifération des armes y compris légères et de petits calibres, constituent aussi des entraves à la stabilisation du pays.
Le retour à l’ordre constitutionnel en mars 2016, marqué par la mise en place des institutions républicaines, a permis l’élaboration des politiques de reconstruction et de stabilisation à travers le Plan de Relèvement et de Consolidation de la Paix en Centrafrique (RCPCA) pour la période 2017-2021 basé sur 3 piliers et 11 objectifs stratégiques. Malgré les efforts déployés, les groupes armés occupent une grande partie du territoire, perpétuant ainsi, un climat d’insécurité, accentuant les inégalités et la pauvreté.
L’exercice de contextualisation et de priorisation des cibles des ODD réalisé de manière inclusive en juin 2018, a démontré que les trois piliers du RCPCA sont alignés sur 57,9% des cibles des ODD (4,8,10,13,16 et 17) retenus qui visent à créer les conditions de promotion de l’Etat de Droit et de l’accès à la justice, de mise en place des institutions efficaces avec une éducation de qualité et une économie prospère et de réduction des inégalités, facteurs de consolidation de la paix.
Selon les analyses, la mise en œuvre du RCPCA a permis au pays de réaliser de légers progrès dans les domaines de l’éducation, de l’économie et de la justice. En effet, la proportion des enfants de moins de 5 ans ayant été enregistrés à l’état civil est passée de 60,7% en 2015 à 62% en 2018; les taux bruts de scolarisation au fondamental 1 sont passés chez les garçons de 108% en 2016 à 129% en 2018 contre 84% en 2016 à 103% en 2018 chez les filles; les taux d’achèvement au fondamental 1 sont passés chez les garçons de 54% en 2016 à 59% en 2018 et chez les filles de 40% en 2016 à 42% en 2018. L’aide publique au développement demeure le principal soutien du pays car, grâce à la mise en œuvre satisfaisante des programmes économiques et sociaux conclus avec les partenaires techniques et financiers, le taux de croissance du PIB réel se maintient sur un rythme de plus de 4% pour les trois dernières années consécutives avec 4% en 2018 ; la part des dépenses primaires dans les charges globales est passée de 48,8% en 2015 à 55,4% en 2018. La proportion de la population carcérale en instance de jugement est passée de 90% en 2015 à 72,6% en 2018. Les transferts de fonds par les migrants sont passés de 707 millions en 2015 à 2,4 milliards de fcfa en 2018.
Cependant, beaucoup restent à faire pour la restauration totale de l’autorité de l’Etat, la réconciliation et l’égalité de genre. Les transferts financiers illicites qui ravitaillent les groupes armés ; le taux de criminalité et le niveau de violence psychologique et sexuelle, ont pris une proportion inquiétante dans les régions occupées en raison de la quasi-absence de l’autorité de l’Etat. La corruption est encore endémique et constitue une entrave à la relance économique. La participation des femmes à la vie sociopolitique est très faible avec une différence salariale entre hommes et femmes de 33 315 fcfa, soit 18% du salaire moyen de la fonction publique. Le réchauffement climatique, la déforestation et la dégradation du sol ont affecté le système de production agricole. Aussi, l’assèchement des cours d’eau réduit considérablement les délais de navigabilité sur le fleuve Oubangui, perturbant le ravitaillement en produits de premières nécessités à des coûts abordables.
En perspectives, des mesures énergiques comme l’opérationnalisation de la Cour Pénale Spéciale, l’application de l’accord politique de paix et de réconciliation, l’accélération de la mise en œuvre de la stratégie de restauration de l’autorité de l’Etat, la bonne gouvernance, ainsi que le renforcement de la coopération bilatérale et multilatérale, sont nécessaires pour la reconstruction d’un Etat de droit prospère et durable, gage de l’atteinte de l’agenda 2030.